Fintechs : les néo-banques dans le viseur des autorités de contrôle

Le célèbre magazine britannique, The Economist, couvrant les sujets d’actualités et de questions internationales, économiques, politiques, sociales, et culturelles, titrait « The Fintech Revolution », déjà, le 9 mai 2015. Aujourd’hui encore, les Fintechs suscitent des interrogations sur leurs changements profonds, voire le bouleversement du secteur financier par leur arrivée sur le marché.

les fintechs et les néo-banques soumises à des contrôles

Qui sont les Fintechs et les néo-banques ? 

Les Fintech forment un ensemble vaste et difficile à définir. Elles peuvent être définie comme « des entreprises de services financiers dont le modèle d’affaires est axé sur les technologies de l’information et de la communication. ». Il peut donc s’agir d’entreprises qui proposent des services financiers comme les services de paiement (qui incluent les crypto-monnaies), les produits d’investissement et les produits de financement.

Dans le cas des banques en ligne ou néo-banques, il s’agit d’entités bancaires qui font appel aux nouvelles technologies pour refonder le modèle relationnel (via internet et les applications mobiles). Elles sont apparues au début des années 2000. Parmi les plus connues en France, on retrouve, BForBank (Groupe Crédit Agricole), Boursorama (Groupe Société Générale), C-Zam (Carrefour Banque), Compte Nickel (Groupe BNP Paribas), Fortuneo (Groupe Crédit Mutuel Arkéa), Hello Bank (Groupe BNP Paribas), ING Direct (Groupe ING), Ma French Bank (Groupe La Banque Postale), Monabanq (Groupe CM11-CIC), N26 Bank, Orange Bank (Groupe Orange) et Revolut.

Quels sont les changements profonds apportés par les néo-banques ? 

Ces institutions bancaires sont souvent perçues ou vendues comme un nouveau changement radical de la structure des marchés bancaires, dans la réalité, la plupart des services bancaires n’ont pas été bousculés profondément. 

En revanche, certaines pratiques ont connu une évolution au bénéfice de la clientèle en leur permettant d’accomplir une partie ou une totalité de leurs actes exclusivement en ligne. Une grande partie de ces acteurs hébergeant leurs données dans des cloud ce qui leur facilite l’accès, la connexion et la gouvernance des données. D’autres intègrent des mécanismes d’identification et de signature électronique ce qui leur offre une simplicité dans leurs relations d’affaires et un gain de temps considérable lors des différents actes effectués par leur clientèle. 

A l’instar d’autres secteurs, notamment la grande distribution, les médias, la musique, et bien d’autres, nul ne peut nier les changements capitaux apportés par ces nouveaux acteurs ayant misé sur les innovations numériques. Ces changements peuvent constituer parfois, une « disruption » technologique sur les marchés bancaires. 

Ces nouveaux acteurs profitent, ainsi, des possibilités offertes par le numérique et les nouvelles technologies pour asseoir une certaine agilité, facilité, rapidité et souplesse dans les transactions et leurs relations avec la clientèle.   Toutefois, le secteur de la banque avait déjà connu des changements profonds avec le développement par exemple des distributeurs automatiques de billets. Mais, l’apport conséquent des néo banques est la modification notable de certaines structures des marchés bancaires. 

Quelles obligations pour les néo-banques ? 

L’expression « néo-banque » est communément utilisée, dans la presse notamment, pour désigner tous nouveaux acteurs du secteur financier en ligne. Toutefois, une « néo-banque » doit nécessairement d’abord être une « banque » comme définie par le Code monétaire et financier. On peut lire à l’article Article L511-8 du code monétaire et financier : 

« Il est interdit à toute entreprise autre qu’un établissement de crédit ou une société de financement d’utiliser une dénomination, une raison sociale, une publicité ou, d’une façon générale, des expressions faisant croire qu’elle est agréée respectivement en tant qu’établissement de crédit ou société de financement, ou de créer une confusion en cette matière.

Il est interdit à un établissement de crédit ou une société de financement de laisser entendre qu’il appartient à une catégorie autre que celle au titre de laquelle il a obtenu son agrément ou de créer une confusion sur ce point. ». 

De manière générale, utiliser le terme de « banque » ou « d’établissement de crédit » pour qualifier une entreprise non bancaire est interdit par la loi. Les acteurs qui utiliseraient cette expression qui ne seraient pas conformes à leur statut et à leur activité pourraient être sanctionnés par les autorités de contrôle. L’ACPR rappelle aux entités concernées de veiller à la conformité de leur communication à leur statut et à leur activité pour favoriser la protection de la clientèle. 

Par ailleurs, les néo-banques sont soumises aux autres réglementations des banques traditionnelles avec , souvent, une spécificité ou une accentuation en fonction des technologies utilisées. C’est le cas de l’utilisation de la signature électronique qui doit respecter la réglementation eIDAS (Les types de signature électronique conforme en Europe). 

Ces acteurs doivent aussi non seulement veiller à  lutter contre les situations relevant de la fraude qui peuvent être facilitées par les actes effectués (souscription, gestion, clôture de compte, etc.) essentiellement ou totalement en ligne, mais aussi, à la protection de la confidentialité des transactions, à la sécurité des données traitées et les autres obligations à respecter en matière de protection de données à caractère personnel ( Les grands principes du RGPD). 

Les néo-banques doivent donc trouver un équilibre entre le respect de toutes ces obligations et l’efficacité des dispositifs pour anticiper les évolutions du marché.  

Auteur:

STEPHANE KOUAKOU-KAN JURISTE EN CONFORMITE

Stéphane KOUAKOU-KAN, Juriste en conformité, spécialisé en Numérique, en Gouvernance des données, en lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Pour aller plus loin

  • Étude sur les modèles d’affaires des banques en ligne et des néobanques, Analyses et synthèses n°96, oct. 2018., p. 4, note 4. 2 
  • Article L511-8 du code monétaire et financier
  • L’impact des Fintech sur la structure des marchés bancaires Laurent Weill, Dans Revue d’économie financière 2019/3 (N° 135), pages 181 à 192
  • LIVRE BLANC – N°2 QUAND LA CONFIANCE PAIE : Les moyens de paiement d’aujourd’hui et de demain au défi de la protection des données, CNIL

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